On ne passe pas !

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Les douilles décorées

La douille décorée est un grand classique de l'artisanat de tranchée, l'incontournable vase qui longtemps trôna sur la cheminée de nos grands-parents et qui finit régulièrement aujourd'hui sur des vides-greniers...

Si l'on retrouve souvent des douilles de 75 mm français, tous les calibres furent utilisés pour cette forme d'art : le 77 mm allemand, le 37 mm français ou le 18 pounders anglais figurent ainsi en bonne place parmi celles que l'on retrouve le plus... à côté de calibres plus improbables comme des douilles de fusées éclairantes ou des balles de fusil.

Un petit échantillonage allant de la douille de 75 mm long à la douille de 11 mm de fusil gras

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Par martelage, estampage et ciselage, la douille devient un vase décoré de gravures ou de reliefs représentant des motifs sentimentaux (prénom de la femme aimée), légers (avec des dessins de femmes, d'angelots), patriotiques et militaires (avec les noms des batailles vécues), ou plus simplement des motifs végétaux et floraux.

Certaines pièces étaient gravées avec des moyens réduits : un petit marteau et un burin improvisé. On remplissait parfois la douille de braises rouges, afin de rendre le laiton plus souple pour pouvoir le graver en profondeur, le cintrer voir même le torsader, avec un pince ou une tenaille, celle utilisée pour couper les fils de fer barbelés faisant l'affaire.

Pour commencer deux douilles de 75 court bien particulières : elles furent ramenées du Front par l'un de mes arrière-grands-pères... Pour plus de renseignements, je vous ionvite à aller faire un tour sur la rubrique présentant le cannonier Soulard.

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La première est simplement décorée d'une couronne de lierre entourant une feuille de lierre, symbole d'attachement.

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La seconde est bien plus inattendue puisque, si elle porte des mentions très françaises comme le nom de mon arrière grand-père "SOULARD HENRI CLASSE 1917", et celui du village du Chemin des Dames où il a été amené à combattre à travers l'inscription "SOUVENIR DE PAISSY", elle arbore surtout un chameau que l'on ne peut guère expliquer que par l'origine de celui qui a décoré cette douille, de nombreuses troupes issues d'Afrique du Nord ayant stationné à Paissy.

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Dans un tout autre domaine, voici l'une des deux douilles d'une paire de 18 pounders anglaise décorée d'un angelot et des initiales "DG".

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Une des deux douilles d'une paire de 18 pounders anglais avec un décor floral, la mention "Souvenir de la Campagne 1914 - 1915 - 1916", les initiales du poilu (A.D.) et les noms emblématiques des campagnes auxquelles ce dernier a participé parmi lesquelles on trouve Charleroi, la Marne, l'Aisne, Verdun ou Craonne.

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Une des deux douilles d'une paire de 75 doublement cintrée

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Une paire de douilles de 77 allemands avec base cintrée, décorées d'oiseaux (faisans ?) picorant un gland sur une branche de chêne.

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Une belle douille de 75 finement décorée d'un bouquet de chardons, symbole de la Lorraine.

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Une autre douille de 75 décorée d'un blason portant les dates 1914 et 1919 ainsi que d'une tulipe, qui rappelle peut-être la Turquie, pays qui participa à la guerre aux côtés des Allemands et contre laquelle des Français se battirent dans les Dardanelles.

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Enfin, une douille de 65 portant un décor oriental rappel sans doute des lieux où combattit l'armée d'Orient.

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Une série de douilles de calibre 37,5 françaises...

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décorées de rameaux de chêne et des initiales "J.J.",

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de pensées et des initiales "MG",

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de l'inscription "VERDUN" surmontée d'un soleil levant, accompagnée d'un pot dans lequel pousse un arbuste, sans doute une évocation de la paix à venir et des arbres qu'il faudra replanter sur les terres dévastées par la guerre,

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de tulipes,

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quand les douilles ne sont pas tout simplement cintrées et vierges de toute inscription.

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Verdun a bien sûr fait l'objet de nombreuses représentations. En voici trois, très différentes, pour rappeler cette bataille qui sévit de février à décembre 1916 et causa la mort de 300 000 hommes, faisant pas moins de 400 000 blessés.

La première est une douille de 75 cintrée qui porte juste l'inscription "VERDUN".

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La seconde est décorée de pensées et d'un aigle posé au sol, les ailes déployées. On ne peut que penser au chant patriotique "Verdun ! on ne passe pas" qui entame son premier couplet par "Un aigle noir a plané sur la ville, Il a juré d'être victorieux" et enchaîne plus loin " bientôt l'aigle noir, La rage au cœur impuissant en son crime, Vit disparaître son suprême espoir."

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La troisième commémore un lieu précis de la bataille de Verdun : la côte 304, une colline située au nord-ouest de Verdun sur laquelle les Allemands concentrèrent leurs efforts. les Français y ont résisté durant 300 jours au prix de 10 000 morts.

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L'auteur de cette oeuvre est aussi à l'origine de celle qui suit, qui commémore un autre lieu emblématique de la première guerre mondiale : la butte de Vauquois. Sur ce site, s'élevait le village du même nom, aujourd'hui disparu, englouti par les explosions dues à la guerre de mines qui y fut pratiquée de 1915 à 1918 : 140 000 hommes perdirent la vie à Vauquois durant le conflit.

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De même facture et décoré des mêmes rameaux de lierre, cette seconde douille se distingue surtout par la représentation humaine qui y est faite : on y voit en effet un soldat portant casque et bandes molletières, en train de fumer la pipe et de graver une douille... à moins qu'il ne lise son courrier...

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Autre bataille, autre représentation : Craonne fait aussi partie des hauts lieux de la guerre et a aussi su inspirer les artistes comme le montre la douille qui suit. On y voit un coq gaulois plastronnant sur ce site du Chemin des Dames où l'offensive Nivelle au printemps 1917, causa la perte de 130 000 hommes en dix jours et où naquit la Chanson de Craonne, chanson contestataire entonnée par les soldats français qui se sont par la suite mutinés.

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D'autres douilles à suivre...

 

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